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Projection onirique

par DELMAS Magali 7 Octobre 2014, 08:19 Nouvelle

Projection onirique

« J’ai levé les yeux et j’ai souri. Ça ne faisait que commencer… » « Action ! ». Installée dans une routine loin d’être une comptine, ça y est, ça m’arrivait à moi aussi ! Qui a dit que ce « il était une fois » se lisait aux enfants seulement à la tombée du soir et ne se vivait en plein jour tout éveillé?

« Interdit ! Comment oses-tu imaginer toucher du bout des doigts ce conte que tu écris pour régler tes comptes avec ta vie ? » semble dire la voix du diable qui répond présent chaque fois que je tente d’écouter celle de l’enfant qui sommeille en moi… D’où sort-il celui-là ? Et qui est-il pour me dicter sa loi ?

Ecrire son histoire sans se raconter des histoires, n’est-ce pas cela qu’on définit comme « l’espoir » ? Aujourd’hui, j’étais enfin décidée à y croire.

Pourquoi n’y aurais-je pas droit, moi, à cette part de bonheur ? J’échange sans regret le "gâteau mea culpa" aux amères saveurs de pleurs et peurs de ne pas être à la hauteur contre une maigre bouchée du "Carpe Diem". Le parfum de confiance a une telle puissance qu'une seule suffit pour se délecter.

Ecœurée de me contenter uniquement des miettes que d’autres trop blasés ont daigné me laisser ! J’étais en plein crise …de foi ! Je venais de la perdre en ceux que j’avais érigés en modèles. Là, assise sur le parquet, les yeux rivés sur mes zombies calés sur la voix de Michaël Jackson qui hurlait « it’s thriller, thriller night, you’re fighting for your life inside of killer… » C’en était trop, c’est ça. Pour la première fois, mes démons, qui avaient si souvent dansé ce corps à corps endiablé avec ceux du Dieu de la danse, resurgissaient avec le visage caricatural d'un ange-gardien porteur d'un message empreint d'une paradoxale bienveillance. Pourtant, la mise en scène du spectacle qui se jouait devant moi relevait davantage du drame que de la comédie romantique au "Happy End": une dizaine de croque-mitaines en sang dansaient comme habités par Satan prêts à m'enterrer vivante...C'était donc ça.

La répétition de l'avant-première touchait à sa fin et emportait avec elle ma réflexion onirique.

- Ca y est, on y est! me lança Charles me ramenant à la réalité.

- Oui.

- Ça va? Tu as l'air ailleurs?

- Non, tout va très bien. Je suis heureuse de te voir. Je languis la première. Ils ont été grandioses! Ils réveilleraient un mort-vivant!

- C'est toi que les gens viennent voir "la grande chorégraphe"!

- Le show existe grâce à eux. Ils lui donnent corps! C'est un travail d'équipe! Je ne sais comment leur témoigner ma reconnaissance. Pour moi, c'est plus qu'un spectacle. Ce soir, c'est un peu comme un de ces films projeté cent fois sur l'écran de l'espoir qui prend vie sur la scène de la réalité. Un rêve de gosse!

Emu, Charles me prend dans ses bras et m'étreint avec tendresse. Plongée dans un état de liesse, je savoure cet instant hors du temps.

- Et ce n'est que le début... me murmure-t-il au creux de l'oreille.

Oui ça ne faisait que commencer et exprimé par Charles mon bonheur était sans pareil. Il était cependant loin de se douter que la musique qui se jouait alors pour moi était une autre que celle qu'il avait composée.

Charles, c'est l'Amour de ma vie. Oui ça fait un peu cliché dit comme ça. Mais c'est ce qu'il est. Loin de s'être rencontrés au lycée, nous nous sommes épris l'un de l'autre quand j'ai commencé à enseigner mes cours de street jazz dans son Opéra. Marié et père de trois enfants, pas du tout le portrait du Prince Charmant que j'avais imaginé. Il le supplante. Même devenu grand il est resté petit! Tout en charmes : humour, finesse, subtilités, douceur. La beauté sous toutes ses coutures. De la haute- couture ! Le statut. Le statut lui conférait davantage le titre de « Prince pas trop charmant »… Loin d'être divorcé ou de l’avoir même envisagé. Nous ne sommes pas dans le traditionnel conte de fée ou la comédie romantique à l'eau de roses. Mais j'ai senti les épines de soi-disant copines. « Copines » car à mes yeux les « Ami(e)s » sont ces personnes qui vous suivent comme votre ombre tout au long de la vie et vous remettent sur le droit chemin si par mégarde vous déraillez. Un ange-gardien aux ailes déployées toujours sur ses gardes qui, sur vous, un œil bienveillant sans cesse garde. Etre amie c’est aimer l’autre dans sa différence sans jamais l’astreindre à la ressemblance. Aimer c’est donner les ailes pour s’envoler sans voler la liberté. Aimer c’est ouvrir la porte de la cage dans laquelle notre amour s’est emprisonné.

C'est ce que je vous disais au départ. Même si les belles histoires ne sont pas exclusivement l'apanage des petits, nous, les grands, nous les vivons parfois comme des enfants candides-ce que certains qualifieront d’enfantillages. Nous les revisitons avec un peu moins de paillettes, un peu plus de manèges sordides dans la tête mais autant de poudre aux yeux. La fin? Elle est multiple. Il n'y a pas de règle car malheureusement la vie n'est pas un jeu que l'on gagne même quand on suit scrupuleusement les lois du cœur. Les peurs et les pleurs sont le plus fréquemment les grands vainqueurs. La lâcheté donne souvent le change! Et si je vous disais qu'elle est plutôt à tendance masculine, je suis certaine de ne pas heurter la gent féminine qui l'a par trop de fois goûtée pour trouver cette attitude étrange.

Mais, Charles et moi étions à part. Pas de promesses illusoires. C'était une évidence dès le départ. Pourtant rien n'était gagné d'avance. Il a fallu se faire confiance et défier les convenances. C'est le prix à payer pour vivre un conte de fée dans notre société des temps modernes. Savoir où l'on va, personne ne peut le prédire réellement sans avancer dans un brouillard londonien à un moment.

- Tu peux assurer mon cours lundi soir comme d'hab? lance Nikki en passant la tête dans l'entrebâillement de la porte de la salle de cours. Le charme de ce moment hors du temps avec mon homme était rompu...

- Désolée, cette fois je pourrai pas.

- Mais d'hab...

-D'habitude oui...là non! L’arrêtais-je net dans son élan. Exaspérée par son petit rituel, j’étais à fleur de peau et sa demande ce soir était celle de trop. C’est comme une chanson qu’on a trop écoutée ou un disque rayé! C'est toujours le même refrain. « Elle, elle, elle ». Les autres et ce qu’ils ressentent, si « elle » n’est pas le centre de leur attention, elle s’en détourne sans compassion.

Seule, de retour chez nous, je m'enferme dans ma salle comme d'autres dans leur bureau. Elle remplissait cette fonction en ce moment. Entraînements à la barre, élaborations de mes cours, réalisations de mes chorégraphies... C'était ma scène à moi, mon lieu de recueillement, le royaume des mondes à explorer et à créer. Le mien prenait corps après deux ans passés à le vivre dans le secret. Plus que quelques heures encore et tous les acteurs entreront en scènes, l’air de rien et loin de s’en douter. Mon bonheur à cette heure sera à son comble.

La première sera simultanément et paradoxalement la dernière !

Après avoir assisté à la séance pour la énième fois devant l’écran de mes pensées, je visionnais en boucle le film de cette soirée et les réactions des spectateurs. J’y étais. J’avais laissé tomber l’armure pour revêtir ma propre parure.

Comme chaque fois que l’émoi prend mon cœur d’assaut, je décide d’appeler Margaux. Elle est la sœur de cœur dont la vie m’a fait cadeau. Se voir, s’émouvoir et entrevoir le meilleur même quand la vie nous en fait voir, c’est notre armure pour parer blessures et coups durs. Une valeur sûre. Je suis riche de ça. Et ça, ça ne se remplace pas.

- Comment te sens-tu ?

- Comme une petite fille à la veillée de Noël, émerveillée par un présent qu’elle ne croyait pas pour elle. C’est encore irréel.

- Non, c’est bien authentique. Ça va même être hypnotique !

- J’espère qu’un imprévu de dernière minute ne retiendra pas Charles à L’Opéra. Mon bonheur ne sera complet que si nous y sommes tous!

- Pas de panique. Il a toujours brillé par sa présence à chaque événement d’importance à tes yeux.

- Tu as raison. Merci petite sœur ! T’es un cœur.

- Et toi, cette robe ? Prête à la voir portée ?

- Plus que jamais…Des années à la confectionner au gré de nos capricieuses pensées ! La voir figée sur un corps fait pour elle, j’en piaffe d’impatience !

- Tu réalises qu’on touche enfin du doigt un rêve qui se concrétise ?

- Oui. Aller, on va rejoindre les bras de Morphée pour être en forme et vivre notre rêve éveillées !

- Encore une nuit après celle-là !

- Fais de beaux rêves Sweety.

- Merci toi aussi petite sœur.

Le rideau se lève sur les corps qui s’animent, s’expriment au rythme des chansons du roi de la pop. Les caméras tournent et des spectateurs en présence mon regard ne se détourne. La première et la dernière se jouaient en ce moment. Mon cœur battait la mesure à toute allure. Il exultait de joie. Le sourire sur mes lèvres affiché, les joues empourprées trahissaient le bonheur que je ressentais. Exposée au regard sans fard. Charles à mes côtés, j’étais comblée. Instant magique à jamais gravé dans ma mémoire. Réminiscence d’une renaissance qui me réchauffera les soirs plus noirs d’un feu qui ne s’éteint pas.

Le scénario se déroulait à la lettre. Je m’éclipsais, pour réapparaître sous le feu des projecteurs parée de la robe confectionnée par ma petite sœur.

Tout ensuite défile. J’aime enfin cette vie qui se profile.

Rideau. Applaudissements. Félicitations. Remerciements. Effusions de joie de mes petits rats. Clin d’œil complice de Margaux. Etreinte de Charles. Margaux, Charles, famille, invités, tous et tout tournent autour de moi. Chagall prend la relève car étourdie par tant d’enchantement vers lui mes yeux se lèvent comme pour lui témoigner mon remerciement profondément reconnaissant.

Enfin, le lendemain se conjugue au présent en devenant « aujourd’hui ».

Nous y voilà. Amis, famille, proches. Et Charles. Là, tous assis plongés dans le noir. Margaux à mes côtés, fidèle alliée dans cette épopée, Charles lui à ce rendez-vous. Ma main embrassée entre les siennes, l’étreinte du bonheur me comblait déjà quoi qu’il advienne. Je retiens mon souffle comme pour mieux entendre le sien…

Sur le grand écran, dans un « shiver » endiablé le voile assorti à ma robe sur mon visage s’est levé. Recueillie par ses bras, d’un baiser ma vie à celle de Charles je viens de sceller sur la note finale de « Danse Nuptiale » signée de sa main.

Rideau. Applaudissements. Félicitations. Remerciements. Effusions de joie de mes petits rats. Couper !

« Projection onirique » inspiré de la vie de Charles Gabriel fondateur de l’Opéra C.G réalisé par Melody Dance sa compagne.

Vers Charles ému et admiratif, « [j]’ai levé les yeux et j’ai souri. Ça ne faisait que commencer…»

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